Couverture live

Etude : un sourire améliore l'humeur... même s'il est forcé

Sciences
lundi 21 novembre 2022
16:36
Écoutez l'article
Etude : un sourire améliore l'humeur... même s'il est forcé
Medi1News + MAP
Écoutez l'article

Le simple fait de simuler le sourire peut améliorer l'humeur, font savoir des travaux d'une publiés récemment dans la revue "Nature Human Behavior".

Une nouvelle certitude

Bien qu’une centaine d'études aient été publiées sur le sujet, leurs résultats ne permettaient pas jusqu’ici d’établir clairement que les expressions faciales influencent l'expérience émotionnelle, une hypothèse connue sous le nom de rétroaction faciale.

"C’est une hypothèse toute simple qui part du principe que si on mime une expression faciale sur notre visage, alors on va avoir tendance à ressentir cette émotion", explique Pierrich Plusquellec, chercheur au Centre d’études en sciences de la communication non verbale (CESCNOV), affilié à l’Université de Montréal.

"Par exemple, si je fais une expression faciale de colère, au bout de quelques secondes, je vais ressentir de la colère. Si je fais une expression faciale de joie, comme cela a été testé dans cet article, je vais alors ressentir plus de joie", poursuit-il.

Cependant, l’hypothèse de la rétroaction faciale n’est pas facile à prouver puisqu’il faut mesurer l’émotion et s’assurer que les personnes miment correctement les expressions.

Au fil de l'histoire

En 1978, les psychologues Paul Ekman et Wallace Friesen mettent au point une méthode de description des mouvements du visage (facial action coding system) qui devient le principal outil de mesure utilisé dans les études s'intéressant à l'expression faciale.

En 1988, le psychologue social Fritz Strack publie une étude qui montre l’existence du phénomène de rétroaction faciale. Dans son expérience, le chercheur demande à des participants d'évaluer le degré de drôlerie d'une série de dessins animés en tenant un crayon entre leurs lèvres, ce qui force un froncement de sourcils; puis entre les dents, ce qui oblige un sourire. Les résultats montraient que ceux qui souriaient ont jugé les dessins plus drôles que ceux qui fronçaient les sourcils.

En 2016, des expériences menées dans 17 laboratoires ne parviennent pas à répliquer les résultats obtenus en 1988.

En 2019, le chercheur Nicholas Coles, de l’Université Stanford, compile cinquante ans de recherches et 138 études dans une méta-analyse qui tend à montrer que la modification de l'expression du visage peut modifier les émotions ressenties.

À la suite de sa méta-analyse, le chercheur Nicholas Coles décide de trancher la question une fois pour toutes en regroupant au sein d’une même étude le projet "Many miles", des chercheurs qui défendent ou s’opposent à la théorie de la rétroaction faciale.

Des résultats déterminants

L'étude a été menée auprès de 3.878 participants dans 19 pays répartis en trois groupes dans lesquels les trois techniques utilisées dans les études précédentes ont été testées, à savoir "imiter les expressions faciales d'acteurs apparaissant sur des photos", "déplacer les coins de la bouche vers les joues en utilisant uniquement les muscles faciaux" ou encore "utiliser la technique du stylo dans la bouche qui consiste à déplacer les muscles faciaux pour simuler un sourire".

Dans chacun des groupes, la moitié des participants ont effectué la tâche en regardant des images joyeuses de chiots, de chatons, de fleurs et de feux d'artifice, et l'autre moitié a simplement observé un écran vide. Ils ont également vu ces mêmes types d'images (ou leur absence) en présentant une expression faciale neutre.

Les résultats obtenus permettent d’établir que les deux premières méthodes entraînent une augmentation perceptible du bonheur, ce qui prouve que les émotions humaines sont liées aux mouvements musculaires. La technique du stylo n’a pas donné de résultats concluants, probablement parce qu’elle ne permet pas de créer une expression authentique qui ressemble beaucoup au sourire.

Ces résultats constituent un argument convaincant en faveur d'un lien entre les émotions humaines et les mouvements musculaires ou d'autres sensations physiques.

"La rétroaction faciale existe, mais ses effets sont faibles. Rien toutefois pour permettre d’espérer traiter la dépression", affirme Pierrich Plusquellec, qui pense toutefois que ces résultats, obtenus après des rétroactions faciales de 5 secondes, ouvrent la porte à d’autres expériences.

Pou rappel, il existe deux types de sourires. Le sourire vrai (involontaire) met en jeu les muscles grands zygomatiques, qui s'étirent obliquement de la pommette à la commissure des lèvres, et les muscles orbiculaires de l'œil, qui forment une zone elliptique autour des paupières et s'étalent en une couche mince sur les paupières elles-mêmes. Le second : sourire faux ou social (volontaire), dans lequel seuls les muscles zygomatiques sont contractés.